Elodie & la tapisserie : une passion de longue date

Quand j'étais petite, à chaque fois que je voyais des sièges endommagés, craqués, je m'imaginais entrain de les recoudre. En particulier le simili cuir orange et marron des banquettes de train des années 80. Je me berçais en suçant mon pouce en imaginant le fil passer à droite, à gauche, à droite, à gauche... et refermer doucement la plaie. Pour autant, cette impression était comme beaucoup de petites choses de l'enfance auxquelles on ne prête pas plus d'importance. Ce n'est que bien des années plus tard, lors d'un atelier de découverte de la tapisserie en siège pendant mes études d'ébénisterie que tout est remonté. C'était inscrit en moi. Aujourd'hui encore, façonner une garniture m'apaise et quand je n'arrive pas à dormir, je m'imagine encore entrain de recoudre un siège.

Je suis plutôt du genre à foncer tête baissée et ne pas faire les choses à moitié. Avec force de persuasion, j'ai toujours réussi à obtenir ce que je voulais. J'ai travaillé dans des entreprises renommées alors que presque toutes avaient refusées ma candidature au départ... J'ai été formée par des meilleurs ouvriers de France, chercheur en histoire du mobilier, entreprises labellisées EPV (Entreprise du Patrimoine Vivant). En tant que femme (gamine même à l'époque!), c'était pas simple de se faire embaucher dans ces entreprises. Bon, ça s'est toujours terminé de la même manière. Une démission. Le sexisme, la hiérarchie, le mansplaining, tout ça c'était pas pour moi. Je me suis mise à mon compte et j'ai rejoint un collectif d'artisans.

Passé l'euphorie des premières années, j'ai ressenti le besoin de donner du sens à ce que je faisais, au-delà de la réparation de fauteuils. J'ai donc commencé à donner des cours. Transmettre mon savoir-faire m'apporte beaucoup en terme d'épanouissement personnel, c'est une partie essentielle de mon activité. Avec les élèves, je redécouvre la richesse de l'artisanat en général. Les mains de l'humain, outil des outils, façonnent une matière vivante pour en faire des objets vivants. Elles sont le trait d'union entre l'esprit et la matière.

Ces dernières années, j'ai consacré une partie de mon énergie et de mon temps à mes enfants qui ont aujourd'hui 6 et 4 ans, laissant mon atelier au second plan. En 2021, l'Atelier Bouchendhomme a fêter ses dix ans et j'ai de nouveau repris les rênes avec une nouvelle énergie. J'ai quitté le collectif pour m'installer seule dans un local plus confortable et mieux adapté à l'accueil des élèves. Répondre à l'appel à projet pour la réhabilitation de l'usine Cosserat a été pour moi une évidence. J'ai tout de suite su que ma place était là, dans ce lieu chargé d'histoire. Cette année, j'ai aussi embauché une apprentie, Samantha, qui m'apporte beaucoup (comme vous pouvez le constater dans la petite vidéo 😉).

Bref, tous ces projets passionnant m'amènent à faire de nouveaux investissements pour redonner un nouvel élan à mon activité. C'est une année intense, particulièrement éprouvante, mais aussi un grand bond en avant. J'ai investi une bonne partie de la trésorerie de mon entreprise ce qui m'oblige à travailler beaucoup pour garder la tête hors de l'eau. Si cette campagne Ulule réussie, ce sera une véritable bouffée d'air pour moi.

L'Atelier est labellisé Artisan d'Art, Charte Qualité de la Chambre de Métiers et de l'Artisanat et acteur *