Le Spleen mis à Nu

Ghislaine Delaire

Les Fleurs du Mal
Une collection des Éditions du Calumet

Les rencontres sont toujours extraordinaires, surtout lorsque l'on le veut bien. Elles peuvent aboutir à un livre comme celui que vous tiendrez bientôt entre vos mains. Elles ont d'autant plus d'importance lorsque ce hasard se manifeste autour de la tombe de Charles Baudelaire. Dès lors, il s'agit de découvrir ou plutôt de comprendre les origines du Spleen, et de proposer cette théorie sur la vengeance par la sublimation, qui explicite l'œuvre au plus près des faits, comme cela a été rarement appréhendé jusqu'à ce jour.
Et comme ce livre est un ouvrage qui révolutionne tout ce qui s'est dit jusqu'à présent sur Baudelaire, cet auteur si cher à tant de lecteurs en France et dans le monde, ce livre, cela ne fait aucun doute, deviendra incontournable pour parler dorénavant de Baudelaire, autant dans son rapport avec sa mère que pour la sublimation qu'il en a fait dans son œuvre, illustrant parfaitement cette toute récente théorie de la vengeance.
Tous ceux qui l'ont déjà lu ont été transformés.

Photo de Carjat retouchée par Kiki Picasso

A propos de l'auteur

Dans cette présentation, autant que pour la réalisation du Spleen mis à Nu, c'est volontairement que nous ne parlons que bien peu de l'auteur, Ghislaine Delaire. L'intérêt de parler de l'auteur n'est intéressant que dans la mesure où il peut apporter quelque chose au livre, que ce soit afin de mieux le comprendre ou pour susciter l'intérêt. Comme ce n'est pas vraiment utile et d'un commun accord, nous avons jugé que pour le moment, cette question n'était pas essentielle et que nous nous contenterons de ce qui est le plus important. Il faut dire que nos rencontres se sont toujours concentrées sur notre intérêt commun, laissant de côté les questions privées pour consacrer ce temps à parler de cette passion qui nous anime, ainsi que pour permettre à ce livre d'aboutir. Inversement, il n'est pas question d'en faire un mystère, elle ne cherche pas à se cacher derrière un quelconque anonymat, elle ne cherche simplement pas à se mettre en avant, et comme elle l'a fait dans son livre, elle préfère laisser la parole à son sujet. D'ailleurs, nous donnons l'occasion, par cette collecte, de la possibilité de la rencontrer.
Et lorsqu'il est question de parler de Baudelaire, de cette passion qui l'anime et de la réflexion qu'elle a mûrie pendant des années avant de réaliser cet ouvrage, sans autre intention que de synthétiser le fruit de cette réflexion... C'est un peu plus tard, après l'avoir largement achevé et fait lire par des gens de son entourage, que devant les nombreux encouragements, elle a pensé qu'elle pouvait peut-être le faire éditer.
Puis ce fut le hasard, et cette rencontre des plus inattendues sur la tombe de Baudelaire au cimetière du Montparnasse. Elle arrivait de Bretagne, de Rennes précisément, où elle réside depuis longtemps.
En parallèle à ses recherches sur le spleen baudelairien, Ghislaine Delaire s'est intéressée à des thérapies comme l'hypnose, pour lesquelles elle participe à différentes conférences avec des spécialistes de ces traitements. C'est à cette occasion qu'elle s'est employée à populariser la théorie de la vengeance. Celle-ci veut que quelqu'un qui a subi ce qu'il considère comme des blessures ou des offenses, celui-ci peut désirer se venger ou prendre une revanche, pas forcément en s'en prenant à ceux qu'il juge responsable de ses affronts, mais par le biais de la sublimation, qui consiste à réaliser le meilleur de ce que l'on est ou de ce que l'on est capable de faire. Et c'est cette théorie de la vengeance qu'elle applique à son sujet, qu'elle aboutit à démontrer que la force de l'œuvre provient de la sublimation des épreuves vécues par le jeune Baudelaire.

Une rencontre comme un présage

Ainsi, c'est lors de cette brève rencontre devant la tombe que pour la première fois, j'entends quelqu'un qui me parle de Baudelaire autrement que tout ce que j'ai pu entendre et lire, quelqu'un qui me dresse un portrait du poète tel que je le pressens depuis toujours, mais que je n'ai jamais cherché à pousser beaucoup plus loin du fait de tous les aléas de la vie, la première fois que je me trouve à écouter quelqu'un développer ce que je ressens sur le cas de Baudelaire, qui à mon sens n'a jamais été vraiment compris par la plupart de ceux qui se sont penchés sur celui qui est considéré encore comme un poète maudit, qui n'aurait eu qu'une vision sombre de la vie, qui n'aurait pas eu à se plaindre entre une mère aimante et un beau-père prestigieux au milieu d'un confort bourgeois. Un portait caricatural et idyllique qui cache des réalités bien différentes, comme le retrace Ghislaine Delaire, réalités qui ont fini par aboutir sur cette tombe, celle sur laquelle nous nous sommes rencontrés. Une tombe dont l'emplacement est pour le moins surprenant et dont je m'étonnais, depuis ma première visite, qu'elle ne fût pas plus polémique. Comment avait-on pu faire une telle offense à un homme au-delà de la mort ? Il n'avait pourtant jamais cherché à se venger de ce mépris autrement que par les mots, lui qui avait écrit une poésie devenue universelle, poésie qui des années plus tard, touche au plus profond d'eux-mêmes de nouvelles générations qui s'y reconnaissent avec ferveur.

Et c'est là, sur cette tombe, que l'on retrouve le sujet du livre, qui est celui de l'incompréhension de l'origine du Spleen par la plupart de ceux qui ont étudié la vie de Baudelaire. Incompréhension également sur le rôle de sa mère, qui a en quelque sorte préféré sacrifier son fils à ce second mari, le si austère général Aupick, personnage de premier plan parmi les plus puissants de son époque. Un homme à l'opposé de ce que fut son père, qu'il eût peu de temps pour aimer, mais qui demeura dans son cœur par les souvenirs de leurs nombreuses promenades ensemble au jardin du Luxembourg.

Le buste de Baudelaire au Jardin du Luxembourg

Il ne trouva jamais cette affection auprès du général Aupick qui le considérait comme un moins que rien, malgré tous les efforts du petit Charles pour tenter de se faire aimer par un beau-père qui le repoussait. Dès lors, il se sentit rejeté aussi bien par son beau-père que par cette mère désormais plus distante. Celui-ci nommé à Lyon, Charles suit et se retrouve en pension. Ce sera son premier déchirement.
Cet épisode sera fondateur dans le destin du poète, dont on retrouve dans les écrits tout le terrible ennui que lui a inspiré cette époque, ainsi que le rejet dont il semblait être victime, avec notamment La cloche fêlée, poème inspiré de cette séparation dans une ville qui lui est inconnue. C'est de là qu'est partie Ghislaine Delaire, qui a préféré écouter ce que disait Baudelaire, essentiellement dans ses poèmes mais aussi dans les lettres à sa mère, pour en tirer des conclusions qui coulent de source, loin des portraits d'un mauvais garçon. Elle présente Baudelaire comme celui qui ne sentait pas aimé pour ce qu'il était, qui aurait tant aimé que ce soit le cas, celui qui a su sublimer les offenses qui lui ont été faites pour en faire des mots poétiques devenus universels et qui émeuvent toujours autant.

A propos de la sépulture de Baudelaire

En définitive, si le sujet du livre n'est pas, autre épisode extraordinaire de cette saga mortuaire, de faire déplacer la sépulture de Baudelaire pour la mettre sous la sculpture réalisée par José de Charmoy, comme j'en fais la demande publiquement, il permet par contre de faire resurgir cette question qui perdure depuis près de 150 ans

.

Une référence qui deviendra incontournable

Il est certain que ce livre a déjà intéressé un grand nombre de lecteurs, nous avons pu en faire l'expérience avec une édition précédente — qui présentait quelques défauts indépendants de notre volonté et qui ne pouvaient être vendus —, nous avons ainsi pu offrir quelques exemplaires. Le constat est très encourageant : non seulement tous ceux qui l'on eut en mains l'ont lu, mais une grande partie a eu besoin de nous exprimer tout le bonheur qu'ils ont eu à sa lecture, et surtout ils l'ont pratiquement toujours passé à quelqu'un d'autre pour le faire découvrir. Tous ceux qui s'intéressent à Baudelaire ne peuvent qu'être touchés à la lecture de cet ouvrage.
Voilà pourquoi ce livre, qui marque une nouvelle vision de l'oeuvre de Baudelaire, serait gâché s'il ne pouvait être réédité rapidement du fait d'une simple histoire de trésorerie.

La tombe du Général Aupick qui abrite contre

son gré la dépouille de Charles Baudelaire