POURQUOI CE PROJET A TAMBACOUNDA

Depuis 2012, une délégation de Monde Solidaire La Flèche, dont je fais partie, se rend à Tambacounda (Sénégal) pour accompagner et suivre des projets.

A 467 km de Dakar, Tambacounda 80 000 habitants est située au sud-est du Sénégal, elle est chef-lieu du département et de la région.

Pendant 4 ans la délégation a participé à l’ouverture de 10 écoles en zone rurale (financement de tables-bancs fabriquées sur place), puis à la mise en place de deux écoles maternelles expérimentales dans des villages ruraux (participation à l’équipement et à la rémunération des monitrices).

Prototype du four solaire fabriqué en France

Ces projets sont initiés par l’association MAEJT (Mouvement Africain des Enfants et Jeunes Travailleurs).

En 2016, nous avons mis en place des ateliers de cuisine, couture et bijoux et ainsi créé des activités rémunératrices pour des jeunes déscolarisés. Pour l’atelier cuisine, le besoin d’un four s’est fait sentir et pourquoi pas un four solaire !

NAISSANCE DU PROJET

Après des recherches sur Internet, j’ai dessiné puis fabriqué un prototype. Très simple à construire, ce four est formé d’un caisson en bois, d’un double vitrage, d’un réflecteur pour augmenter le rayonnement sur le double vitrage et d’une tôle pliée pour le foyer. Le fond du foyer est peint en noir pour produire l’effet de serre. Ce four permet d’atteindre des températures de 120 à 150° (température relevée avec une sonde thermique).

Au mois d’août, mon épouse a testé des recettes (différents types de gâteaux, poissons, pizzas, tomates farcies, riz, lasagnes, pain), les essais ont été très concluants.

Four solaire prêt pour le voyage au Sénégal

Je décide d’emmener ce four à Tambacounda et d’acheter les outils nécessaires, je pense gagner du temps pour sa mise en œuvre et ne pas être tributaire des « aléas africains ». Je rédige une notice de montage. J’emballe de four démonté dans un carton 1m x1m sur 10cm d’épaisseur.

MISE EN PLACE DES FOURS SOLAIRES A TAMBACOUNDA

En mars 2017, je me rends à Tambacounda. Je suis accueilli par l’association MAEJT et dès le lendemain de mon arrivée une dizaine de jeunes (16-20ans) remontent le four avec beaucoup d’enthousiasme. Les jeunes filles de l’atelier cuisine peuvent tester des recettes que j’ai amenées, puis des recettes plus africaines.

Pendant ce temps, avec le soutien financier de la Chambre des métiers, je mets en place une formation de menuisiers. En trois jours, nous fabriquons un four standard, une réplique du prototype et deux fours familiaux, dans les locaux de la Kora-PRD (un acteur de changement économique et social au Sénégal). J'ai été surpris par la dextérité, le sérieux et la détermination des 11 jeunes qui ont participé à cette formation. Je suis sûr qu'ils sont suffisamment autonomes pour en fabriquer d'autres.

Cuisson des pizzas (recette sénégalaise) dans le four familial

A la fin de mon séjour nous décernons une attestation de stage à chacun des jeunes.

Avant mon départ, une petite fête est organisée, la presse locale est présente et tout le monde peut déguster les mets préparés dans les 4 fours. L'engouement des gens et leur investissement font plaisir à voir.

L'association MAEJT va assurer la promotion des fours solaires en les mettant en oeuvre sur le marché et en les présentant à la foire exposition qui se tient à Tambacounda du 1er au 7 avril 2017.

Avec la coordinatrice du MAEJT nous voulons tout mettre en oeuvre pour que ce projet fasse tache d’huile. Nous avons comme objectif de mettre à la disposition de la population 10 fours (5 modèles standards et 5 modèles familiaux) dans des quartiers bien ciblés. Une personne référente par quartier sera formée à la cuisine solaire par l’association MAEJT.

Pour financer cette extension du projet, j'ai décidé de faire appel à un financement participatif.

PHOTOS COMPLEMENTAIRES :

- Les femmes expérimentent la cuisine solaire - Fabrication des fours dans les locaux de la KORA-PRD

INTERÊT DE LA CUISINE SOLAIRE

L’énergie produite par le soleil est gratuite, inépuisable et non polluante. Le soleil peut très facilement fournir l’énergie nécessaire pour chauffer l’eau (pasteurisation) et cuire les aliments, offrant ainsi une alternative à la cuisson au bois qui présente de nombreux inconvénients.

Dans la région de Tambacounda 92% des habitants utilisent le bois comme combustible domestique. La consommation moyenne pour une famille de 5 personnes est de 5 kg de bois par jour. La collecte de bois représente 15 heures de travail par semaine pour une famille.

Cuisine au bois pour 92% de la population

La cuisine solaire présente en final de multiples avantages :

1 – pour la SANTE des populations :

- Elle évite les maladies des yeux et des poumons liées à l’exposition aux fumées pendant la préparation des repas. Les nourrissons attachés dans le dos de leurs mères sont particulièrement exposés.

- Elle évite les maux de dos et de la colonne vertébrale liés au portage du bois,

- Elle limite les diarrées, source majeure de la mortalité infantile, en permettant la pasteurisation de l'eau.

Les nourissons, victimes des fumées toxiques

2 – pour l’ENVIRONNEMENT :

- Elle réduit le déboisement et l’érosion des sols qui s’ensuit

- Elle permet de diminuer l’émission des gaz à effet de serre (CO2)

- La biomasse, herbes et bouses, restent utilisables en tant qu'engrais naturels pour enrichir le sol.

La déforestation menace le Sénégal et surtout la région de Tambacounda

3 – pour l’ECONOMIE familiale et locale

- Elle réduit les dépenses de combustible (bois, charbon, gaz, kérosène)

- La fabrication des cuiseurs solaires crée de l’emploi local, pour les menuisiers mais aussi pour les femmes, qui peuvent, par exemple vendre des plats cuisinés ou des gâteaux au marché. Elle permet de créer des activités à des jeunes déscolarisés (un des buts du projet).

4 – en terme de PROGRES SOCIAL :

- Les femmes et les enfants sont « libérés » de la corvée de bois et de la surveillance de la cuisson. Ces heures deviennent disponibles pour l’éducation, la formation, les soins de la famille.

Corvée de bois : les femmes et les enfants mis à contribution

Au bilan, la promotion des fours solaires s’inscrit parfaitement dans une démarche de développement durable, par des effets positifs qu’elle engendre dans les domaines social, économique et environnemental à l’échelle locale autant que nationale.

Limites du projet

Cependant, il ne faut pas sous-estimer les difficultés qui naissent du changement d’habitudes nécessaire. Cette simple modification du mode de préparation des repas sous-entend également d’importantes modifications des coutumes qui présentent le principal frein au changement. Il est donc indispensable d’adapter la mise en route de la cuisson solaire aux conditions locales, afin que la population en ressente tous les bénéfices pour accepter l’abandon de certaines pratiques ancestrales.

Quelques précautions d’emploi :

- Le four solaire ne fonctionne qu’avec le rayonnement direct du soleil, nuages, brumes, poussière réduisent donc le rayonnement et prolonge le temps de cuisson.
- De même, pour capter le maximum de rayonnement, il faut orienter correctement le four solaire par rapport au soleil. Il suffit de le réorienter une fois par heure.
- Pour perdre le moins de chaleur possible, éviter de trop ouvrir le four pendant la cuisson ! Enfourner rapidement en l’ouvrant au minimum pour passer le plat.
- Les récipients doivent être de couleur foncée ou peints en noir (du côté externe seulement). Il faut prévilégier des marmites à paroi mince.
- Il est inutile de remuer ou de surveiller la cuisson : rien ne brûle, ni ne déborde dans le four solaire !
- La cuisine sénégalaise qui est lente et mijotée se prête bien au four solaire