image">

Le Villa de-la Cire Voilà la marque d'impudence qu'il cherchait dans Les paroles de Ficklhead lui revinrent en tête. En effet. ces archives. personne n'attendait rien de lui ou qu'il révolutionne Voilà la loi qui dans les mémoires. qui ap- sa charge. Tant qu'il ne dérangeait pas, la majorité des puierait sa résolution et lui accorderait le respect des villageois se souciait peu de l'identité du maire. foules, sans incriminer le moindre villageois - mort ou Pas plus de chance de ton côté vif. Esmée secoua la tête. La lueur de la lanterne ne rous- La flamme de la bougie mourut dans sa flaque blan- sissait que les premières mèches encadrant sa figure, en plongeant la pièce dans le noir. tachant le reste un noir de poix l'engloutissant dou- Esmée à l'insu de Theobald qui se répétait cement dans Seulement celle-ci. désormais les deux articles de tête, tandis que les Elle attrapa un rouleau dans son dos. vieilles trognes imposaient à son esprit. Il se délectait Je l'ai mise de côté parce qu' elle coche tous tes déjà d'assister au délitement de leurs grands airs, critères, mais je ne vois pas comment tu pourrais l'ap- lorsqu'il réaliseraient qui ils perdraient leur emprise pliquer. Et elle comment dire... particulière. Il sur l'office. Il murmurait la loi comme un mantra s'agit des premières lignes, juste là, suivie de la liste de quand il remarqua qu'il ne voyait plus ceux qui l'ont enfreinte. Des coups secs retentirent dans la pièce. Un souffle Theobald lui prit le parchemin des La bougie traînant, mourant sur les murs épais des archives. Il n'était à présent qui une petite barbo- tint à l'étagère des décrets, le sol irrégu- tant dans son bouillon de cire, que seule la fragrance lier comme un aveugle, se crispant à tout instant d'hortensia bientôt leur bon souvenir, lorsqu'un parchemin se froissait sous ses doigts. Il dans le noir, Aussi fit-il couler ce qu'il restait de mèche brandissait la loi châtiant la mort comme une et de cire sur le sol en terre battue, puis il se pencha quand une toux cireuse lui gratta les poumons et qu'il par-dessus pour lire le parchemin. chercha à l'étouffer, l'énervant plus encore, le pliant Le rouleau portait le nom du deuxième maire du en deux. village, Herald Candelast, et remontait plus de trois Quand il se redressa, un long visage de cire le sur- siècles. prit, avant de fondre sur les doux traits d'Esmée. La jeune femme se précipita vers lui. Art. I Il est interdit à toute personne à Quelque chose ne va pas ? Candelast n'étant pas née au village, ni mariée à un Elle était revenue avec une bougie à la des Candelastois de naissance ou n'ayant pas au village bois. La pièce voisine aux archives renfermait un au moins dix ans précédant les faits de trépasser sur le territoire du village légalement établi et reconnu par la exemplaire de chaque senteur de bougie, qu' un nez candelastois eût jamais imaginé, par souci de mairie. mémoire. Article II Quiconque enfreindra cette loi sera passible C'est la fatigue, elle me fait voir des choses. On de poursuites judiciaires, elle ou ses proches, et punissable ne me reprendra plus boire jusqu'à plus soif, jamais, selon le que le maire en poste jugera souffla-t-il en se massant la poitrine. on termine 18 19 Théobald est nouvellement élu maire de Candelast, un village de ciriers. Il espère raviver l'influence l'autorité de son pouvoir, fortement diminués depuis l'ancien mandataire, son propre père. Pour cela, il ressuscite une ancienne loi, interdisant aux étrangers de mourir sur le territoire de sous peine de poursuites judiciaires post-mortem. Effectivement, à Candelast. comme les morts peuvent revenir grâce aux pouvoirs des nécromanciens, tant ils errent encore dans Théobald à l'ancien général de la dernière guerre nécrotique défait à Candelast Mais il ignore que la maladie de cire le ronge, et que même sa demeure ancestrale et ses vouloir lui faire passer un message..

L'objectif du projet est de financer la production d'un ouvrage, publié aux éditions Tirage de Têtes, et correspondant au projet de fin d'année d'un étudiant. Il s'agit d'une novella de fantasy horrifique, qui sera publiée fin septembre 2024.

Il s’agit d’un texte de fiction court, d'une centaine de pages en moyenne, comme dans la collection « Une Heure Lumière » chez Le Bélial ou encore chez les éditions du Chat Noir. Ce format sert plus facilement l’horreur – de plus en plus difficile à maintenir à mesure que l’ouvrage prend du volume. Cette brièveté se retrouve dans les autres médias de cultures de l’imaginaire : en audiovisuel, on préfère le format du court-métrage ; et dans le jeux vidéos, ce sont généralement des jeux assez courts (et d’ailleurs, notons que les jeux plus longs, prennent souvent un aspect beaucoup plus action, et l’horreur en pâtit généralement).

C’est la publication d’une anthologie de fantastique-horreur par les Éditions Goater qui va donner une direction à mon projet. Notamment grâce à cette interrogation venue naturellement parmi mes proches qui découvraient cet ouvrage : « Pourquoi l’horreur est aussi rare en littérature ? ». Mon appétence pour les fictions à l’ambiance horrifique allant grandissant ces dernières années (les séries de Mike Flanagan ; Silent Hill ; Les jeux FromSoftware ; Resident Evil ; etc.), j’ai décidé de suivre cette piste.

L'HISTOIRE FEAR TASY
Le village de la cire, Candelast, se passerait bien de maire. Ce qui ne plaît guère à Theobald, quand il hérite de l’office. Pour raviver l’autorité perdue du temps de son père, il exhume une ancienne loi interdisant aux étrangers de mourir sur le territoire du village, sous peine de poursuites judiciaires post-mortem. En effet, à Candelast, comme ailleurs, les morts ne restent pas toujours en terre. Avec le soutien d’un juge du royaume des nécromanciens, Theobald s’apprête à réveiller un général déchu de la dernière guerre nécrotique, mort aux portes du village. Mais il ignore que la maladie de cire le ronge, et que sa vieille demeure et ses fantômes semblent vouloir lui faire passer un message…

Nergal Firbens est né en Bretagne. Il se découvre une passion pour l’écriture et la littérature à la fin du lycée. Son imaginaire a été initialement nourri par les mangas. Quand il n’écrit pas, il dévore des livres jeunesse et de fantasy/fantastique. Il fait ses premières armes sur Short Édition. Il est depuis peu diplômé d’un master métiers du livre et de l’édition.

L’Entre-deux, hiver 1092

Le chapelet d’âmes errantes s’épaississait enfin, sur les terres de l’Entre-deux. Une brume dormante muait à peine autour du guerrier, brassant les illusions d’un temps étriqué. Les ruines du passé se superposaient aux monuments du présent, délités dans les cendres de l’avenir.
Une pointe d’émotion sourdit en Kalembdor, l’ombre d’une expression sur son visage perclus. Les crocs de l’Après, que seuls les morts pouvaient voir, se dressaient devant lui. Trois vies d’hommes à hanter le continent. Et voilà qu’il approchait enfin de sa destination. Bientôt, songeait-il, viendrait le repos.

Le trépas était tout sauf une sinécure. Chaque instant des défunts se ponctuait de la crainte qu’on les rappelle à la vie. Le bruit courait, d’ailleurs, que la nécromancie gagnait les foules. Qu’on ne la condamnait plus comme en son temps, que des lois en régulaient la pratique, et que des villages entiers d’âmes ravivées s’érigeaient. Certaines rumeurs parmi les morts rapportaient même que ces ramenés commerçaient avec les vivants. Un frisson eut parcouru Kalembdor, s’il n’était pas qu’un frisson lui-même.

Sa vie se résumait à l’éradication de toute trace des arts les plus sombres, dont on parlait à voix basse jusque dans les enfers. Sans jamais cesser, il avait massacré adeptes démoniques et nécrophiles, liches et sbires sataniques, jusqu’au roi mort-vivant de trop, dans le Gouffre de Tezak-düld. Le poison d’une lame lui avait rongé les chairs jusqu’aux os des jours durant, jusqu’à ce qu’il s’écroulât dans une bourgade du Nord.

Le guerrier courrait jusqu’aux crocs, s’il le pouvait. Mais les pas d’un mort pèsent le poids de l’âme. Et les massacres innombrables de Kalembdor densifiaient la sienne. Le bien et le mal n’existaient pas dans l’Entre-deux. Toutes les vies se valaient, de l’enfant encore dans la couche à la plus ignominieuse des crapules. Le guerrier traînait avec lui, accrochées à ses chevilles et pesant sur ses épaules, les milliers de vie, toutes créatures confondues, écourtées sous ses coups. Comme une marche à contre-courant au plus profond des mers, ou la traversée d’un interminable bloc de pierre.

Il notait avec une certaine amertume le flot d’âmes qui le dépassait sans efforts. Simples silhouettes opalescentes en lesquelles brûlait la flamme de leur essence. Les plus lestes n’abritaient qu’une flammèche vive et cristalline, alourdie d’aucune rancune. En la sienne couvait un feu rageur, qui lui pourléchait les chairs astrales et rappelait à son souvenir un pâle écho de la douleur qui avait eu raison de lui. Quand les plus lourdes, la pire vermine, se consumaient d’un brasier sombre, synonyme d’une souffrance ininterrompue. Si l’âme de Kalembdor ne comptait parmi les plus pures, il échappait au moins à la torture de l’âme qui brûle. Du moins, jusqu’à la sentence qu’il recevrait du juge de l’Entre-deux, siégeant au seuil des crocs.

Qu’importe le verdict, qu’importe le châtiment, tant que l’errance cessait.

Quelques centaines de mètres séparaient Kalembdor des crocs, engloutissant les morts dans l’impasse d’un squelette titanesque. L’affaire de quelques heures de marche pour les pas de plomb du guerrier. Et déjà, la carrure imposante du juge sans visage de l’Entre-deux se découpait dans les ténèbres de l’Après.

Après le fourmillement qui avait parcouru ses traits figés, un sourire aurait presque soulevé le coin de ses lèvres. Quand une goule lui barra la route, et déroula devant lui en parchemin qui disait :
« Kalembdor, Seigneur des Monts Dalors, mort à Candelast. WârdElias, juge nommé par l’ordre nécromancien, vous convoque à comparaître devant lui pour répondre de votre mort devant les autorités de Candelast. »

Aussitôt le message transmis, la goule fondit en un tas de vase, de chair et de boue.

Le guerrier considéra la flaque agitée d’un léger remous avec ce regard hébété propre aux morts. De quoi l’accusait-on ? Et depuis quand les lois dérangeaient-elles les morts ? Quel était cet Ordre nécromancien qui s’en accordait le droit ? Une foule de questions qui surchauffait son cerveau ramolli, et qu’il balaya d’un revers de la main.

Il voulut enjamber la goule pour continuer sa route vers l’Après, et le repos éternel à portée, quand la goule l’engloutit.

Elle le recracha quelques mètres plus loin, et ses pas répondirent d’eux-mêmes à l’appel. Il fit demi-tour, sans remarquer le grumeau de goule agrippé à ses talons.

Il ignorait combien de temps retourner à Candelast lui prendrait, désormais qu’il connaissait la voie, et il repensa aux mots qu’il répétait aux soldats couards avant un combat s’annonçant difficile.

Marche ou crève.

Il avait déjà crevé. Et pourtant, il marchait encore.

Le Village de la Cire - Novella de fantasy horrifique

Le Village de la Cire - Novella de fantasy horrifique